Alstom – Siemens : il est temps de refonder la politique de la concurrence

Communiqué de la Délégation socialiste française

Les eurodéputés socialistes et radicaux ont pris connaissance aujourd’hui de la décision de la Commission européenne de rejeter la fusion Alstom-Siemens.

Pour les eurodéputés socialistes et radicaux, cette décision démontre l’urgence de refonder la politique de la concurrence européenne : cette dernière ne peut plus empêcher l’Europe de se doter de la politique industrielle dont elle a tant besoin.

Sur cette fusion nous appelions à la vigilance en termes d’emplois ou d’équilibre dans la gouvernance, mais nous sommes déterminés à favoriser la constitution de champions européens pour défendre les intérêts européens et faire face à la concurrence internationale. C’est un des thèmes importants de notre programme pour les prochaines élections européennes : « nous réviserons la politique de concurrence européenne et assouplirons les règles d’octroi des aides d’État pour faciliter l’émergence de champions européens face aux géants chinois et américains ».

Nous restons en cela pleinement fidèles à un vote important en début de législature sur la politique industrielle, qui stipulait notamment :

« Pour les secteurs soumis à une concurrence mondiale, le Parlement européen demande que, lorsqu’elle définit les marchés géographiques pertinents dans ses analyses et ses comparaisons, la Commission européenne prenne le marché mondial comme marché de référence et ne limite pas son analyse au seul marché intérieur »[1].

Il est très clair que la Commission européenne n’a pas, dans l’étude de ce cas, pris en compte le marché mondial : le concurrent chinois – CRRC – pèse deux fois plus lourd qu’Alstom et Siemens réunis. Le premier sort de ses usines 230 trains à grande vitesse par an, le second 35. Combien de temps allons-nous rester passivement à regarder les Chinois s’imposer dans tous les secteurs ?

Si la politique de la concurrence doit servir à lutter contre les géants américains qui abusent de leur position ultra-dominante, elle ne doit pas faire de l’Union européenne l’idiote du village planétaire en ouvrant son marché sans construire ses acteurs, en empêchant ses entreprises de se regrouper tant qu’elles restent des nains à l’échelle mondiale. Quand bien même elles seraient dominantes à l’échelle européenne.

Sur les plateformes, la Commissaire Vestager a su faire preuve de courage et de modernité. Pourquoi ne pas bousculer les règles du jeu et faire preuve d’autant de vision d’avenir sur l’industrie ?

[1] rapport d’initiative sur le développement d’une industrie européenne durable des métaux de base : http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+REPORT+A8-2015-0309+0+DOC+XML+V0//FR

La réforme de la #SNCF en débat

Jeudi 3 mai je suis intervenue aux côtés de Christophe Bouillon, député de Seine-Maritime, chef de file socialiste sur le projet de loi sur la réforme ferroviaire à l’Assemblée nationale, lors d’un café-débat organisé par les sections socialistes du 11ème, 12ème et 20ème arrondissement de Paris. Ce fut l’occasion de revenir sur la réforme SNCF, les risques sous-jacents et les véritables intentions du gouvernement.

En propos introductifs Christophe Bouillon a rappelé les deux axes principaux que propose le texte : la dimension européenne implique la transposition du 4ème Paquet ferroviaire de 2016, un texte européen qui norme l’ouverture à la concurrence mais qui ne remet pas en cause le statut des cheminots, qui relève uniquement des Etats-membres ; et la demande de l’Europe de faire la différence entre le gestionnaire d’infrastructure et l’opérateur. A son sens, la loi proposée par le gouvernement, en faisant disparaitre le statut particulier des cheminots est une forme de préemption sur une prochaine privatisation. Le gouvernement a vocation à mener un combat politique, sinon il aurait fait une réforme sur la mobilité et sur les moyens de la développer. Sous prétexte de réduire la dette, le statut des cheminots est remis en cause, alors qu’ils n’impactent en rien sur la dette du pays.

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Crédit photo : Mathieu Delmestre

Lors de mon intervention j’ai rappelé que le 4ème paquet ferroviaire avait pour origine la vision globale portée par Jacques Delors « se déplacer partout en Europe et en train » ; mais pour y parvenir il était essentiel de régler des questions techniques afin d’harmoniser les systèmes de transports. Dans le paquet ferroviaire il y deux axes à prendre en compte : les questions politiques et les questions techniques et de sécurités. Au sein du groupe des sociaux-démocrates au Parlement européen nous partageons la vision de Jacques Delors de faciliter les déplacements des européens, mais les forces politiques de droite considèrent d’abord et avant tout ce paquet comme une occasion de toujours plus libéraliser ce secteur économique en soutenant l’accès à la concurrence totale. Que ce soit sur le volet Gouvernance ou sur celui portant sur l’obligation de service public les socialistes et démocrates ont défendu le principe du maintien du service public du transport ferroviaire qui ne pouvait être remis en cause au prétexte d’une moindre rentabilité. Maintien des lignes et protection des droits des travailleurs étaient nos lignes rouges.

Sur la question des cheminots, il n’y a rien au niveau européen qui remette en cause ce statut spécifique. Les négociations pour la mise en place d’une convention collective pour tous les salariés du secteur ferroviaires avaient été engagées dans les gouvernements précédents par F. Cuvillier et A.Vidalies, alors ministres des transports. Les socialistes avaient bien avancé jusqu’en mai 2017, mais depuis l’arrivée d’E. Macron au pouvoir les négociations se sont grippées. Sur le statut de la SNCF, qui risque de se transformer en société anonyme, ce n’est pas une demande de l’Union européenne, au contraire recentrer les activités des infrastructures et de l’opérateur sont contraires aux dispositions européennes !

J’ai également insisté sur le fait que l’ouverture totale à la concurrence pour les lignes à grande vitesse telle qu’adoptée par la majorité de l’Assemblée nationale est un choix politique assumée par la majorité française et en aucun cas une disposition européenne. L’Etat peut et devrait privilégier l’obligation de service public garantie par les textes européens notamment pour les TGV afin de regrouper dans un contrat des lignes rentables et non rentables pour garantir la cohésion territoriale. SI le gouvernement fait le choix de l’ouverture selon le principe du « libre accès » pour tous les opérateurs privés ce sera un choix de politique libérale qui pourrait avoir de graves conséquences pour les services publics mais ce ne sera pas une décision imposée par Bruxelles. Au Royaume-Uni, tout le système est privatisé et les prix des billets sont très chers. En Suède, les usagers veulent revenir à un opérateur unique ; car avec plus de 20 opérateurs, ils n’ont aucune garantie sur les horaires, les correspondances ou encore les tarifs.

Plusieurs questions ont été posées sur la dimension écologique de l’utilisation du train plutôt que de la route, ce fut l’occasion de revenir sur mon rapport Euro-redevance, sur l’instauration des péages routiers partout en Europe. Un texte qui traite largement la question de l’environnement et de la lutte contre la pollution ; car en instaurant des péages à l’échelle européenne le transport de marchandises par le fret, qui pollue moins, sera plus compétitif. La question ferroviaire c’est d’abord et avant tout permettre aux personnes et aux marchandises de se déplacer mieux, plus loin et sans polluer, à des tarifs raisonnables.

 

 

 

Révision de la directive Electricité : nous devons protéger nos services publics

Mercredi 29 novembre, j’ai rencontré  les représentantes et représentants de 4 syndicats présents dans l’énergie en France : la fédération Mines Énergie CGT, la fédération Mines Énergies FO, la CFE Énergies, et la fédération Chimie Énergie CFDT.

Nous avons échangé autour du vaste paquet énergie climat proposé fin 2016 par la Commission européenne, actuellement en travaux plus ou moins avancés au sein du Parlement européen, qui comporte 8 textes législatifs d’une importance majeure pour la production et la distribution d’énergie partout en Europe, non seulement en lien avec la transition vers des sources d’énergie plus propres, mais aussi dans le contexte d’une pression toujours plus forte pour un marché dérégulé qui se heurte au modèle français de service public centralisé.

Participer à un projet de l’ampleur de l’Union européenne suppose bien entendu que chaque État-membre renonce à quelques pans de sa souveraineté, car le collectif nous rend plus forts, plus efficaces, plus performants. Mais cela ne doit pas signifier renoncer à ce qui fait notre socle de droits sociaux et nos services publics. Il est important que les États européens puissent renforcer certains modes de fonctionnement qui s’avèrent efficaces et utiles – l’existence de tarifs régulés de référence, la garantie que tout le monde, dans toute la diversité géographique de notre pays, paye le même prix, sans discrimination territoriale, la garantie aussi d’un approvisionnement stable sans black-out, comme c’est le cas chez certains de nos voisins européens, tout ceci fait partie du modèle français que j’ai envie de défendre et qu’il faut pourvoir développer à l’échelle européenne.

Si nous voulons que les citoyens se sentent impliqués dans ce beau projet politique qu’est la construction européenne, il est important de travailler pour préserver aussi leurs intérêts, et plus poursuivre la dérégulation à toute force des secteurs aussi sensibles et stratégiques que l’accès à l’électricité pour tous.

Visite du Grand Port Maritime de Dunkerque

Vendredi 6 novembre, avec mon collègue Guillaume Balas, j’ai visité le Grand Port Maritime de Dunkerque.

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Je souhaitais en effet pouvoir observer et discuter avec les acteurs du GPMD sur plusieurs sujets européens :

Le rapport de mon collègue Knut Fleckenstein sur la révision du règlement de la Commission européenne sur la libéralisation des services portuaires ; le Canal Seine-Nord et le fret ferroviaire ; la transition énergétique et l’incitation au carburant au Gaz (GNL) des bateaux.

Guillaume Balas prépare actuellement un rapport pour la Commission emploi sur le dumping social et s’attache beaucoup à cette dimension très présente dans le secteur des transports.

Nous avons commencé la visite par un échange avec Stéphane Raison Directeur général du GPMD et ses deux directeurs adjoints, François Lambert et Daniel Deschodt. Stéphane Raison nous a présenté les deux projets stratégiques du port (2008_2014 et 2014-2020).

L’ensemble Calais-Boulogne-Dunkerque-Douvres constitue le 1er ensemble portuaire européen.

La valeur ajoutée du GPMD provient de sa multimodalité : voies ferroviaires directement sur le port, le canal Grand gabarit qui préfiguration du Canal Seine Nord, Autoroutes. Dunkerque est le premier port ferroviaire. Il a une capacité de transfert en fret de 20 millions de tonnes à l’année, aujourd’hui ce ne sont que 8 millions de tonnes qui partent par le train. En deçà des 300 km de trajets le fret n’est pas compétitif avec le transport par route. La question de l’orientation des subventions d’Etat se pose là (taxe Diésel, eco taxe, etc).

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La concurrence est rude avec le port d’Anvers (Belgique). 25 000 emplois (directs indirects induits) pourraient être créés si GPMD tirait son épingle du jeu. Pour comparaison le port d’Hambourg génère 260 000 emplois.

Les marchandises débarquant à Anvers viennent en France uniquement par la route.

Anvers est aussi une plateforme chimique et pétrolière avec 53 millions de tonnes de produits pétroliers

Le site d’Arcelor Mittal présent sur le port de Dunkerque est le 1er site européen de l’entreprise

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Le GPMD bénéficie d’une très grande surface de stockage avec 130 000 m2 d’entrepôts.

La stratégie du schéma portuaire repose sur le développement durable et l’économie circulaire.

Un site de transformation en GNL a été installé (1er site de production en Europe). Station d’avitaillement pour les industriels. La transformation du CO2 en éthanol est également réalisée sur le site. Le gaz des hauts fourneaux est récupéré et transformé.

La connexion avec le Canal Seine Nord bénéficiera fortement à la zone céréalière du Nord Pas de Calais Picardie.

Le port de Dunkerque pâtit de la concurrence déloyale du port d’Anvers notamment en raison du principe de l’autoliquidation de la TVA. 16 pays sur les 28 européens ne la pratiquent plus. Les démarches imposées aux PME dans les ports de France ne participe pas à l’attractivité de ceux-ci. Une simplification des procédure est vivement demandée par tous les acteurs.

En termes d’emplois, le port de Dunkerque emploie autant de dockers qu’en 1992 : 550. Ce site n’a pas connu de mouvements sociaux depuis longtemps. La discussion sociale semble fonctionner.

Le deuxième temps d’échange s’est déroulé avec les représentants syndicaux de tous les corps de métiers de l’Union Maritime et Commerciale (pilotes, remorqueurs, lamaneurs, industriels présents sur site . Etaient notamment présents Jean-Charles le Gall, Président de l’UMC, Hervé Gauducheau Président de la station de pilotage de Dunkerque, Philippe Fasquelle Président du syndicat des transitaires du port de Dunkerque, Bruno Mahieu Responsable des opérations armement de Boluda Dunkerque, Philippe Lannoeye Responsable de l’Agence CMA CGM de Dunkerque.

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Nous avons commencé par discuter de la réforme européenne des services portuaires. Les professionnels sont très inquiets de voir les activités de remorquage et de lamanage toujours inclues dans le règlement et soutiennent que mes amendements visant à les en exclure pour conserver ces service public hors du cadre de la libéralisation souhaitée par la Commission européenne.

En revanche, ils saluent les propositions de transparence financière qui permettra un dialogue plus constructif avec tous les acteurs lors de l’élaboration des programmes stratégiques.

Ils pâtissent également de la concurrence avec Anvers et souhaitent un programme d’investissements ambitieux sur le GPMD.

Comme la direction du GPMD, l’UMC souhaite vivement que les opérations d’autoliquidation de la TVA soient simplifiées. Cette procédure a déjà été engagée pour les grandes entreprises, il faudrait que les procédures de simplifications soient également appliquées au PME.

Ils nous ont également fait part de leur crainte que pourrait constituer le Canal Seine Nord si les ponts actuellement présents depuis le port de Dunkerque n’étaient pas surélevés en conséquence.

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Nous avons poursuivi la journée par la visite du Port. D’une superficie remarquable (plus de 17km), le GPMD est un espace multifonctionnel dans lequel coexistent les activités classiques d’un port qui dispose de bassins de dragage de sédiments, les activités pétrochimiques des grands groupe comme Arcelor Mittal, Total, Pechiney, les espaces dédiés au stockage des containers, mais aussi une chapelle pour les marins, et une commune !

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N’ayant pas eu suffisamment de temps, nous avons convenu avec Guillaume Balas de rencontrer les syndicats des personnels dès la semaine prochaine.