» Procès de journalistes en Turquie : un verdict absurde et disproportionné « 

Communiqué de la Délégation socialiste française

C’est avec stupeur que nous apprenons que les journalistes Nazlı Ilıcak, Ahmet Altan et Mehmet Altan ont été condamnés à la prison à vie par la cour pénale d’Istanbul. Le jugement ignore les recommandations de la Cour constitutionnelle demandant la libération de Mehmet Altan au motif que ses droits avaient été violés au cours de sa détention. Le jugement d’une extrême sévérité précise que les journalistes seront détenus en cellule d’isolement avec un régime de visites très restrictif. Accusés d’avoir participé au coup d’État avorté de juillet 2016 sans aucune preuve valable, le verdict est absurde et disproportionné.

Les eurodéputés socialistes et radicaux demandent la libération immédiate et sans conditions de tous les journalistes détenus sans preuves dans les prisons turques. Ces hommes et ces femmes exercent un métier indispensable à la démocratie et défendent, au prix de leur vie, la liberté d’expression et de la presse. Condamner les violations des droits humains et la détérioration constante de l’État de droit est indispensable mais cela n’est pas suffisant et l’Union européenne a les moyens d’agir. Nous demandons à la Commission européenne de suspendre le financement du processus d’adhésion avec la Turquie tant que les journalistes ne seront pas libérés et tant que les valeurs fondatrices de l’Union ne seront pas respectées.

Détention de Loup Bureau : La Délégation socialiste française écrit à JY Le Drian

Voici notre courrier adressé le 31 août au ministre de l’Europe et des Affaires étrangères concernant la détention en Turquie du journaliste Loup Bureau

Monsieur le Ministre,

Depuis plus d’un mois, le journaliste français Loup Bureau est détenu pour avoir exercé son métier de journaliste, profession indispensable à l’exercice de la démocratie. Interpellé à la frontière turco-irakienne, Loup Bureau, 27 ans, a été mis en examen puis incarcéré à la prison de Sirnak, dans le sud-est de la Turquie, pour « appartenance à un groupe terroriste armé ». Il encourt jusqu’à trente ans de prison. Il lui est reproché d’avoir réalisé un documentaire en 2013 pour la chaîne TV5 Monde auprès des combattants kurdes en Syrie (YPG), une organisation considérée comme terroriste par la Turquie. Aucun avocat n’a eu accès au dossier.

Ce qui se passe en Turquie est une menace pour nous tous. L’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 nous le rappelle : « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux. Tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement ». Mais ce droit est trop souvent bafoué dans une tentative de monopole et de contrôle de la vérité.

Nous comprenons qu’un contact au plus haut niveau politique s’est tenu à ce sujet entre le président de la République et son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan. Le chef de l’État français a fait part de « sa préoccupation ». Hormis cet échange, la situation ne semble pas depuis lors avoir évolué favorablement.

Au côté du comité de soutien de Loup Bureau, de l’organisation Reporters sans frontières (RSF) la délégation socialiste française au Parlement européen (DSF) dénonce cette arrestation politique et en appelle à une mobilisation politique européenne. À ce titre, nous avons entrepris de demander l’inscription d’une résolution d’urgence du Parlement européen sur ce cas de violation flagrante des libertés et droits fondamentaux durant la session plénière de septembre à Strasbourg.

Depuis le coup d’État manqué de juillet 2016, le pouvoir turc multiplie les arrestations, de journalistes notamment. On en dénombrerait à l’heure actuelle plus de cent soixante emprisonnés. Sans compter les purges qui s’accélèrent au sein de l’armée, des médias, des opposants et des ONG.

Certains de votre soutien et votre engagement sans faille dans le combat pour la défense de nos valeurs de justice et de liberté d’expression, nous comptons sur votre action et celle du gouvernement pour que la libération de notre compatriote et celles de tous ses confrères arbitrairement incarcérés intervienne rapidement.

Restant à votre disposition pour tout échange que vous jugerez opportun, nous vous prions de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de notre haute considération.

Christine Revault d’Allonnes-Bonnefoy, Présidente

Et les membres de la Délégation socialiste française : Eric Andrieu, Guillaume Balas, Pervenche Berès, Jean-Paul Denanot, Sylvie Guillaume, Louis-Joseph Manscour, Edouard Martin, Emmanuel Maurel, Gilles Pargneaux, Vincent Peillon, Virginie Rozière, Isabelle Thomas

 

 

Rapport annuel 2016 sur la Turquie : de nombreux sujets de préoccupations

Communiqué de la Délégation socialiste française

Le rapport annuel 2016 sur la Turquie couvre de nombreux sujets allant du processus d’adhésion à l’union douanière en passant par les droits de l’Homme.

Ce rapport s’inscrit à la suite du vote en novembre 2016 sur le gel des négociations de l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Plane aussi sur ce rapport l’ombre d’une nouvelle proposition de la Commission concernant la modernisation de l’actuelle union douanière UE-Turquie. Proposition pour le moins sujette à débat.

Le rapport revient sur ce contexte géopolitique complexe dans lequel se trouve aujourd’hui la Turquie. Dans ce cadre du vote d’aujourd’hui, les eurodéputés socialistes et radicaux se sont prononcés en faveur de la suspension des pourparlers d’adhésion avec la Turquie si la réforme constitutionnelle d’avril 2016 venait à être appliquée.

En outre, les eurodéputés socialistes et radicaux appellent à une utilisation transparente et respectueuse du droit de l’aide financière européenne en Turquie, dans le respect des valeurs défendues par l’Union européenne.

Par ailleurs, pour le groupe socialiste et démocrate, le respect des droits de l’Homme doit demeurer un préalable à tout approfondissement des relations, quelles soient politiques ou commerciales, de l’UE avec ce pays.

En effet, chaque jour, le Gouvernement de M. Erdoğan bafoue la démocratie. Dans le contexte de l’état d’urgence, M. Erdoğan se livre à une véritable chasse aux sorcières : universitaires, maires, recteurs d’université, politiciens de l’opposition et journalistes sont qualifiés de «terroristes». Des dizaines de milliers de fonctionnaires ont été licenciés et 50 000 personnes ont été emprisonnées. Ces violations flagrantes des normes démocratiques ne peuvent pas rester sans conséquences sur les négociations en cours.

Conférence à la Maison Jean Monnet

Vendredi 27 janvier, je me suis rendue dans la maison où vécut Jean Monnet sur invitation de Maurice Braud, président de l’association Jean Monnet. Cette maison qui appartient désormais à l’Union européenne est aujourd’hui un musée et un lieu de rencontre et d’échange sur Europe.

Jean Monnet est l’un des pères fondateurs de l’Union du fait de sa grande participation à la construction européenne au lendemain de la seconde guerre mondiale. Son idéal était celui d’une Europe fédérale dans laquelle les peuples européens pourraient vivre en paix. Soixante ans après la signature du traité de Rome, la paix est bien là pourtant la cohésion de l’Union européenne n’a jamais été aussi menacée : Brexit, montée des nationalismes, crise de la solidarité européenne. Malgré ses nombreuses ressources, l’Europe peine à être audible.

En cette année d’élection présidentielle, l’Europe doit revenir au cœur de la campagne. C’est maintenant qu’il faut porter l’idée européenne et défendre ses valeurs.

Suite à mon intervention, de nombreuses questions furent posées par de nombreux citoyens, notamment des jeunes apprentis du centre de formation en alternance pour l’expertise comptable de Paris.

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Nous avons ainsi pu échanger sur les missions du Parlement européen et ses relations avec les autres institutions de l’Union européenne, les missions inhérentes à mon mandat de députée européenne et mon quotidien partagé entre Bruxelles, Villejuif et Strasbourg.

Autre sujet sur lequel nous avons dialogué : l’avenir de l’Union européenne, le risque d’émiettement qui la guette avec le Brexit et l’émergence de mouvements nationalistes. En effet, avant d’être un grand marché de biens et de services, l’Union européenne est un ensemble valeurs et doit protéger les droits fondamentaux des citoyens européens. Il est ainsi nécessaire de poursuivre le dialogue entre les peuples européens. La force de l’Europe, c’est son multiculturalisme, ce sont ses échanges, notamment entre les jeunes européens grâce au programme Erasmus +.

Enfin, nous avons débattu des relations que l’Europe entretient avec le monde, notamment avec les Etats-Unis de Donald Trump ou encore avec la Turquie.

J’ai conclu notre échange en rappelant que l’accueil des réfugiés ne devait pas être considéré comme un problème mais un défi qu’il faut relever dans la solidarité. Alors que certains aimeraient dresser des murs entre les Etats européens, je pense au contraire qu’il faut un nouveau pas en avant vers une Europe plus intégrée, sociale, écologique. Une Europe multiculturelle et qui protège les plus faibles.

 

Relations UE-Turquie : le Parlement rempart de l’état de droit

Communiqué de la délégation socialiste française

Les purges continuelles menées depuis la tentative de coup d’État en Turquie nous inquiètent au plus haut point : progressivement, ce sont tous les principes de l’État de droit qui sont démantelés par M. Erdogan. Les atteintes à l’indépendance du pouvoir judiciaire et à la liberté d’expression sont inacceptables à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Union européenne.

La place de la Turquie dans la gestion des flux migratoires ne saurait nous faire taire sur les attaques répétées de M. Erdogan contre la démocratie.

C’est pourquoi nous nous félicitons du vote, aujourd’hui au Parlement européen, d’une résolution appelant à geler les négociations d’adhésion de la Turquie. Nous envisageons également la suspension des aides de préadhésion. Nous devons tout faire pour que M. Erdogan respecte l’État de droit ainsi que les droits de l’Homme. Il en va de notre crédibilité. Mais la porte de l’Union reste ouverte. C’est pourquoi nous avons bloqué les offensives des députés qui souhaitaient une suspension des négociations. Une telle suspension équivaudrait de facto à un arrêt des négociations, puisque leur reprise nécessiterait l’unanimité au Conseil.

Notre condition pour un retour aux discussions est claire, c’est le retour d’un gouvernement turc qui respecte l’État de droit et des droits de l’homme.

Réfugiés : plus que jamais, la solidarité

Communiqué de la délégation socialiste française

Les eurodéputés socialistes et radicaux ont déjà eu l’occasion de dénoncer le marchandage entre les 28 Etats membres et la Turquie (relire notre communiqué du 8 mars, « Un Sommet UE-Turquie : pour 3 milliards de plus » : http://www.deputes-socialistes.eu/un-sommet-ue-turquie-pour-3-milliards-de-plus/ ).

Lors du sommet européen d’hier, les dirigeants européens ont en partie corrigé le tir en réaffirmant certaines conditions que la Turquie devra respecter.

Néanmoins, de sérieux doutes subsistent sur de nombreux points :

– d’abord, sur la légalité, la mise en œuvre et le coût des retours des réfugiés vers la Turquie ;
– ensuite sur les réinstallations des Syriens depuis la Turquie : il suffit de voir les difficultés des Etats membres pour tenir leurs engagements en matière de relocalisation des demandeurs depuis la Grèce et l’Italie pour être sceptique…
– enfin, les engagements de l’Union européenne vis-à-vis de la Turquie posent problèmes, qu’il s’agisse du respect des critères pour la libéralisation des visas des ressortissants turcs ou la traçabilité des fonds européens déjà alloués.

Les eurodéputés socialistes et radicaux réaffirment qu’il est indispensable de déconnecter la question des réfugiés et celle de l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Nous réaffirmons avec force que la liberté de la presse, le respect des droits humains, des droits des minorités et de l’Etat de droit sont des valeurs incontournables pour les Etats membres et ceux qui aspirent à rejoindre l’Union européenne.

Par ailleurs, il est capital que toutes les procédures qui seront mises en place respectent le droit d’asile et les dispositions de la Convention de Genève : le droit à un examen individuel, le droit de recours, ainsi que le respect des conditions d’application liées aux concepts de « premier pays d’asile » et de « pays tiers sûr ».

Les eurodéputés socialistes et radicaux redisent leur attachement au droit d’asile, à la protection des réfugiés et à la solidarité. Si les pays européens veulent sortir par le haut de cette situation sans renier les valeurs européennes, ils doivent mettre en pratique la solidarité entre les Etats membres pour accueillir celles et ceux qui fuient la violence, la solidarité avec les Etats qui prennent sur leur sol le plus grand nombre de réfugiés et la solidarité avec ceux-ci.

Enfin, alors que le printemps arrive, la route libyenne va de nouveau être utilisée par les passeurs, qui sont plus rapides que les chefs d’Etat et de Gouvernement pour faire évoluer leurs pratiques. Aussi, l’Union européenne doit rejeter le piège d’une Europe forteresse et ne pas renier ses valeurs. Plus que jamais, pour préserver le droit d’asile, elle doit ouvrir des voies d’accès légales et sécurisées pour les réfugiés, notamment par le biais d’une politique de réinstallation permanente et obligatoire.

Pour toutes ces raisons, nous plaidons pour une réponse européenne solidaire au défi migratoire (relire nos propositions du 4 septembre 2015, http://www.huffingtonpost.fr/pervenche-beres/aide-accueil-migrants-europe_b_8088404.html ).

L’échec du sommet UE-Turquie

Un débat sur les conclusions du sommet UE – Turquie était organisé le mardi 8 mars au Parlement européen. Cet accord montre une nouvelle fois que les Etats Membres sont prêts à s’asseoir sur nos valeurs communes pour mettre de côté l’accueil des demandeurs d’asile syriens. Il prévoie de renvoyer un demandeur d’asile syrien en Turquie contre un réfugié Syrien réinstallé en Europe et est assorti du versement par l’Union européenne de 3 milliards d’euros supplémentaires pour la Turquie d’ici 2018 en plus des 3 milliards déjà agréés ces dernières semaines.

Alors que nous attendions des décisions fortes concernant l’accueil des réfugiés, des mesures de relocalisation, la mise en œuvre de voies sûres et légales de migrations vers l’Europe ou encore une refonte du Règlement Dublin, force est de constater que le repli sur soi a de nouveau gagné une bataille. Pourtant, l’Union européenne reste et demeure avant tout un projet politique que je veux inclusif et que je pense solidaire.

A l’issue de ce débat pendant lequel je n’ai pu intervenir, j’ai déposé une déclaration écrite dont vous trouverez ci-dessous le contenu :

« L’Union européenne et ses États membres ont lamentablement échoué à répondre au défi de l’accueil des réfugiés. À la place, ils sont prêts à tirer un trait sur leurs obligations internationales en refoulant des demandeurs d’asile vers la Turquie. Le sommet d’hier a ainsi enterré tout espoir d’une Europe solidaire, humaine et responsable. Et si une aide humanitaire est requise d’urgence en Grèce, cette dernière ne doit pas être transformée en un gigantesque camp de réfugiés. Nous attendions des prises de position fortes sur la mise en œuvre des décisions de relocalisation, sur lesquelles les États membres se sont déjà mis d’accord; la sauvegarde de l’espace Schengen, à travers un plan précis pour la suppression des contrôles aux frontières intérieures; ou encore le développement de voies sûres et légales pour les réfugiés et les demandeurs d’asile vers l’Europe. Nous prônions également une refonte complète de Dublin, pour le remplacer par un système européen d’asile harmonisé, basé sur la solidarité et le partage des responsabilités entre tous les États membres. Rien de tout cela n’a été obtenu : le bilan de ce sommet, déplorable, s’est soldé sur un marchandage indigne, marquant la victoire des égoïsmes nationaux sur l’intérêt général européen. »

Un Sommet UE-Turquie : pour 3 milliards de plus

Communiqué de la Délégation socialiste française

Au dîner des chefs d’Etat et de Gouvernement d’hier était prévu un dessert appelé « Misérable ». Par ce pied de nez, les cuisiniers n’auraient-ils pas parfaitement résumé ce sommet ?

Ainsi, l’Union européenne se préparerait à sceller de petits arrangements peu glorieux.

Au nom de la realpolitik, les États membres semblent prêts à s’asseoir sur un certain nombre de principes et à finaliser avec la Turquie un marchandage indigne : « Un Syrien renvoyé contre un Syrien réinstallé », le tout assorti de 3 milliards d’euros supplémentaires dont la destination reste inconnue.

La Déclaration fait à peine référence à la politique interne en Turquie et préfère fermer les yeux sur le pouvoir autoritaire du président turc, Erdogan, sa mainmise sur les médias ou l’emprisonnement et les menaces sur les universitaires.

Dans le même temps, la Grèce devrait être financièrement très aidée mais elle serait, de fait, transformée en un gigantesque camp de migrants et de réfugiés, barricadée dans des frontières que ses partenaires voudraient croire étanches.

On attend vainement des éléments probants concernant la fermeture de la route des Balkans, la lutte contre les passeurs et les trafiquants d’êtres humains et plus encore sur la mise en oeuvre des engagements pris par les 27 autres États membres en matière de relocalisation.

Le bilan de ce sommet, c’est que sous couvert de décisions « communes », c’est l’idée même d’une Europe solidaire et responsable qui est mise en échec.